Arnaud Michniak
Grenoble [La Bobine] - vendredi 28 février 2014 |
J'avais rendez-vous avec le tilt. Si l'on n'était pas Isérois, il fallait en avoir envie, d'aller gagner Grenoble ce jour-là pour ne pas manquer la venue d'Arnaud Michniak dans les parages. Un temps horrible, une météo défavorable et toujours ce putain de ciel noir, mélange de nuages mécontents et de pollution... L'ambiance " ville désaffectée " était froide et pesante en cette fin d'après-midi, et convenait parfaitement à l'écoute des vieux albums de Programme, ou de Poing perdu, le premier effort solo de l'artiste toulousain. Puis une éclaircie avant que la lumière de la journée ne parte, et que la Lune ne tombe : c'était peut-être le moment de s'insérer le surprenant Pour qui sonne le tilt dans les oreilles.
En tout cas c'est ce que j'ai fait, moi, dans les rues de Grenoble, puis en cherchant La Bobine pendant une bonne vingtaine de minutes près de la grande Bibliothèque municipale. Atmosphère sympa une fois sur place, dans un décor type chalet savoyard : de tout et de tout le monde, l'entrée de la petite salle est blindée ; quelques étudiants étrangers, des trentenaires et jeunes quadras en sortie pour le weekend, patientant dehors malgré l'inévitable froid de Grenoble, beaucoup de retard également, et une bière de la région absolument imbuvable : dommage, on se rabattra plus tard sur un autre type de pression.
Aux alentours de 21 heures 15, alors que ça s'impatiente autour de moi, les Grenoblois de Jull se mettent en place dans la salle de concert en bas, accueillante, bien foutue et à dimension humaine... C'est le moins que l'on puisse dire, car il n'y a pas grand monde. Mais tant mieux. On remarque direct le grand nombre de personnes venues encourager l'équipe locale : des proches, je dirais, en majorité. Le groupe peut dérouter ou passionner, c'est au choix : Jull propose une poésie naïve et quelque peu fleur bleue, tantôt récitée, tantôt susurrée par un chanteur empruntant beaucoup aux grands noms du rock français et de la chanson, le tout sur fond de nappes de guitares estampillées post-rock, et de samples ambiants. Ça parle surtout d'arbres, de brins d'herbes et de petits oiseaux, et il est regrettable que l'aspect " musique cinématographique " ne se retrouve pas plus que ça sur scène. On adhère ou pas. Le résultat est lancinant et planant, un peu trop peut-être : la formation contente les supporters mais ne réveille la salle qu'au milieu du set avec des morceaux un peu plus pêchus, avant de renchaîner sur la tranquillité pour conclure une première partie qui aura duré une bonne heure. Quoiqu'il en soit, on ne peut pas enlever à Jull que leur prestation aura été parfaitement gérée de A à Z. Sur la fin, on se met à attendre très impatiemment Arnaud Michniak, " le monsieur qui va suivre ", pour reprendre les termes du chanteur de Jull, à qui l'on doit tous " un grand merci " pour sa présence en ce soir.
Et ce qui devait arriver arriva, après un bon moment d'attente, laps de temps parfait pour aller se ravitailler en houblon à l'étage du dessus. Michniak, croisé auparavant en train de fumer une clope parmi la foule, débarque sur scène : simple, naturel, besogneux, un sweat de sport en guise d'uniforme et une barbe de trois jours, le chanteur commence à organiser son espace sous les acclamations d'une salle malheureusement vidée après le set de Jull. Qu'est-ce que ça peut foutre ? Une bière posée par terre et son Mac placé à proximité, Michniak checke le micro et les retours et va très rapidement s'asseoir derrière son clavier Korg. Il est 22 heures 30 lorsque retentissent les premières notes de la musique cérébrale que j'attendais depuis : l'ancienne tête pensante de Diabologum démarre avec ce qui semble être "À la frontière", rapidement transformé en une intro à trois têtes, comprenant des bouts et des paroles de "Un caillou dans la poche" et "Mon bureau", mélangés en une seule et même ouverture. Puis le chanteur s'empare de son ordinateur et lance "Au moment du monde", issu du dernier EP Le petit prince, laissé à l'état de démo. À la fin du morceau, Michniak parle. " Bonsoir Grenoble ! Toujours les mêmes ? ". Quelques sourires moqueurs après, il nous balance "Le Jackpot", facilement reconnaissable à son piano désarticulé et malsain, quelque part entre un cauchemar de croupier et une ambiance à la Freaks : monstrueuse parade musicale, en effet : " j'ai mangé de l'homme attaché à mes rêves, le corps plein de vers et de bouts de fer ". La poésie noire, froide et parfois morbide de Michniak est toujours intacte, lui qui vit totalement ses morceaux, le regard non pas vide mais vidé, projeté devant lui ou au sol, et occupant la scène comme un lion en cage. " Rendez-vous à la gare ", jette-t-il en se courbant, pour achever son morceau.
Tour à tour, les titres qu'Arnaud Michniak nous propose sonnent comme des nouveautés ou des avant-premières, certains figurant probablement sur la démo Le petit prince, alors que d'autres pourront se retrouver sur Écho, l'album à paraître d'ici quelques mois, et qu'il semble être venu défendre. On se retrouve donc face à des pièces toutes neuves, dont les noms m'échappent forcément, même si on croit se sentir capable de les deviner : une chanson énorme avec un texte super bien amarré (Michniak répète " comme on a vissé haut " avec un flow saccadé), puis un morceau qui sonne 100% rap français, avec comme fil conducteur un " checke ceux qui savent ", martelé par le maître de soirée, ainsi qu'une instru géniale sur piano déglingué. Un autre extrait est interprété, sans que Michniak ne communique avec son public, froid et réservé : peut-être s'appellera-t-il "Debout sur le fil", encore un qui retient mon attention. Tout est enchaîné à grande vitesse, urgent et instinctif, micro au poing, avant que l'artiste ne calme le jeu avec un titre clavier/voix agrémenté de nombreux effets.
C'est là qu'Arnaud Michniak nous offre quelques pépites immanquables de son dernier album, qu'il exécute de manière magistrale, sans artifice, avec justesse, émotion et beaucoup de pudeur, comme une retenue : "La Lune nous voit", pour commencer, magique, puis ce grand moment se prolonge quand arrive la rythmique entêtante de "Sans notice", lourde et presque tribale. Deux morceaux incroyables, très représentatifs de l'esprit du fabuleux Pour qui sonne le tilt. Le chanteur s'assied ensuite sur un retour, et envoie un nouveau morceau, calme et angoissant, puis nous sort une autre chanson délirante façon "Le Jackpot", en un peu plus légère. Une fois le titre lâché, Michniak s'empare d'une guitare et embraye sur quelques accords en palm mute : le suspense est lancé alors que la gratte dissone tranquillement, et au bout d'une longue improvisation, on peut reconnaître les paroles de "À travers les gens comme au fond de moi", dans une étrange version modifiée, abrégée et peut-être légèrement expédiée. Michniak quitte la scène, rapidement rappelé à l'ordre.
Le chanteur revient et demande : " est-ce qu'il y a des loups à Grenoble ? " ; " vous voulez un truc lourd ? On va faire un truc lourd, pour les loups ". Et derrière son propos bizarre, il avait raison de nous prévenir : le morceau annoncé est basé sur une très grosse instru hip hop. On assiste même à une surenchère avec une autre chanson excellente, qui dégage beaucoup d'émotion, et qui sonne elle aussi salement rap français (" j'ferais mieux... ", répété machinalement par le chanteur, comme à lui-même). Peut-être la couleur du nouvel album à venir ? C'est là qu'on se demande comment on peut ramener le style de Michniak à du simple spoken word, tant sa musique est singulière et ne ressemble à aucune autre, et surpasse les limites des cages dans lesquelles on pourrait l'enfermer. On en a la preuve face à lui. L'intéressé nous interpelle alors, un brin arrogant et visiblement satisfait de son taf : " vous en voulez encore ou ça suffit ? ". C'est là qu'il nous lâche ce qui sera peut-être le morceau le plus surprenant de tout le concert, dans la veine des titres précédents, plus rap français que le rap français, et en même temps, conçu avec la griffe reconnaissable entre mille de l'ex-Diabologum. Planante, groovy, voilà encore une instru géniale qui accompagne un texte coup de poing, à la fois simple, limpide et émouvant, que Michniak terminera en le dédicaçant à plusieurs personnes, à La Bobine, et à Grenoble. Enfin, une dernière rythmique urbaine en guise d'estocade fera office de conclusion du méfait, mêlant à nouveau des paroles de différentes chansons, "Tandis que" et "Je suis le peuple sans visage", avant qu'Arnaud Michniak ne disparaisse d'un coup, comme un voleur, à peine l'improvisation entamée, nous laissant seuls avec sa musique qui continue à tourner sur son ordinateur, puis dans nos cerveaux, et enfin dans le vide. Le tilt avait sonné.
Au final, je ressors bluffé du programme qui aura duré à peine plus d'une heure. Bluffé par tant de spontanéité, d'urgence, et de vérité déployée par Michniak. Le tout dans un set maîtrisé de bout en bout, sur ce qui était certainement l'une des prestations les plus punk que j'ai pu voir, dans le fond. On pourrait peut-être simplement regretter de ne pas avoir pu vivre en live quelques morceaux encore plus bruts et directs en guitare/voix, débarrassés des machines, ou bien plus d'anciennes pièces issues de Poing perdu ("Je suis le peuple sans visage" ayant été à peine mentionné...). Si l'on poussait l'analyse un peu plus loin, on se demanderait si l'artiste n'assume plus ses premiers efforts ou si, tout simplement, il ne cherche pas à passer complètement à autre chose. Mais qu'importe : il fallait bien défendre ce prochain opus, et les morceaux malheureusement occultés de ses dernières compositions. De toute façon, en sortant d'une heure intensive d'un concert pareil, on sait que l'on a eu affaire à un génie têtu et perfectionniste en la personne d'Arnaud Michniak. Si sa musique est parfois narrée, à travers son chant si caractéristique, et la mise en scène dépouillée et efficace de ce qu'il a à nous dire ou nous faire comprendre, alors j'estime avoir assisté au récital d'un conteur hors du commun. À recommander franchement à quiconque voudra écouter de la poésie, des mots tranchants et de la sincérité, et à tous les récents adorateurs de groupes aux noms de félins (je ne pense, bien évidemment, pas uniquement à Pantera...). Ce mec est sans aucun doute l'un des artistes les plus talentueux et les plus sous-estimés du paysage musical français, toutes scènes et tous styles confondus.
Je me casse de La Bobine, non sans avoir retenté l'expérience bière locale. Tout le monde semble s'être remis du choc. Pas moi. Et alors que la voix de Michniak raisonne encore dans mon crâne atteint, je m'enfonce à nouveau dans les rues noires et désertes de Grenoble, pour m'y perdre. Épilogue cohérent de la soirée à laquelle j'ai assisté, rare et unique. Pendant ce temps, la Lune me voit...
En tout cas c'est ce que j'ai fait, moi, dans les rues de Grenoble, puis en cherchant La Bobine pendant une bonne vingtaine de minutes près de la grande Bibliothèque municipale. Atmosphère sympa une fois sur place, dans un décor type chalet savoyard : de tout et de tout le monde, l'entrée de la petite salle est blindée ; quelques étudiants étrangers, des trentenaires et jeunes quadras en sortie pour le weekend, patientant dehors malgré l'inévitable froid de Grenoble, beaucoup de retard également, et une bière de la région absolument imbuvable : dommage, on se rabattra plus tard sur un autre type de pression.
Aux alentours de 21 heures 15, alors que ça s'impatiente autour de moi, les Grenoblois de Jull se mettent en place dans la salle de concert en bas, accueillante, bien foutue et à dimension humaine... C'est le moins que l'on puisse dire, car il n'y a pas grand monde. Mais tant mieux. On remarque direct le grand nombre de personnes venues encourager l'équipe locale : des proches, je dirais, en majorité. Le groupe peut dérouter ou passionner, c'est au choix : Jull propose une poésie naïve et quelque peu fleur bleue, tantôt récitée, tantôt susurrée par un chanteur empruntant beaucoup aux grands noms du rock français et de la chanson, le tout sur fond de nappes de guitares estampillées post-rock, et de samples ambiants. Ça parle surtout d'arbres, de brins d'herbes et de petits oiseaux, et il est regrettable que l'aspect " musique cinématographique " ne se retrouve pas plus que ça sur scène. On adhère ou pas. Le résultat est lancinant et planant, un peu trop peut-être : la formation contente les supporters mais ne réveille la salle qu'au milieu du set avec des morceaux un peu plus pêchus, avant de renchaîner sur la tranquillité pour conclure une première partie qui aura duré une bonne heure. Quoiqu'il en soit, on ne peut pas enlever à Jull que leur prestation aura été parfaitement gérée de A à Z. Sur la fin, on se met à attendre très impatiemment Arnaud Michniak, " le monsieur qui va suivre ", pour reprendre les termes du chanteur de Jull, à qui l'on doit tous " un grand merci " pour sa présence en ce soir.
Et ce qui devait arriver arriva, après un bon moment d'attente, laps de temps parfait pour aller se ravitailler en houblon à l'étage du dessus. Michniak, croisé auparavant en train de fumer une clope parmi la foule, débarque sur scène : simple, naturel, besogneux, un sweat de sport en guise d'uniforme et une barbe de trois jours, le chanteur commence à organiser son espace sous les acclamations d'une salle malheureusement vidée après le set de Jull. Qu'est-ce que ça peut foutre ? Une bière posée par terre et son Mac placé à proximité, Michniak checke le micro et les retours et va très rapidement s'asseoir derrière son clavier Korg. Il est 22 heures 30 lorsque retentissent les premières notes de la musique cérébrale que j'attendais depuis : l'ancienne tête pensante de Diabologum démarre avec ce qui semble être "À la frontière", rapidement transformé en une intro à trois têtes, comprenant des bouts et des paroles de "Un caillou dans la poche" et "Mon bureau", mélangés en une seule et même ouverture. Puis le chanteur s'empare de son ordinateur et lance "Au moment du monde", issu du dernier EP Le petit prince, laissé à l'état de démo. À la fin du morceau, Michniak parle. " Bonsoir Grenoble ! Toujours les mêmes ? ". Quelques sourires moqueurs après, il nous balance "Le Jackpot", facilement reconnaissable à son piano désarticulé et malsain, quelque part entre un cauchemar de croupier et une ambiance à la Freaks : monstrueuse parade musicale, en effet : " j'ai mangé de l'homme attaché à mes rêves, le corps plein de vers et de bouts de fer ". La poésie noire, froide et parfois morbide de Michniak est toujours intacte, lui qui vit totalement ses morceaux, le regard non pas vide mais vidé, projeté devant lui ou au sol, et occupant la scène comme un lion en cage. " Rendez-vous à la gare ", jette-t-il en se courbant, pour achever son morceau.
Tour à tour, les titres qu'Arnaud Michniak nous propose sonnent comme des nouveautés ou des avant-premières, certains figurant probablement sur la démo Le petit prince, alors que d'autres pourront se retrouver sur Écho, l'album à paraître d'ici quelques mois, et qu'il semble être venu défendre. On se retrouve donc face à des pièces toutes neuves, dont les noms m'échappent forcément, même si on croit se sentir capable de les deviner : une chanson énorme avec un texte super bien amarré (Michniak répète " comme on a vissé haut " avec un flow saccadé), puis un morceau qui sonne 100% rap français, avec comme fil conducteur un " checke ceux qui savent ", martelé par le maître de soirée, ainsi qu'une instru géniale sur piano déglingué. Un autre extrait est interprété, sans que Michniak ne communique avec son public, froid et réservé : peut-être s'appellera-t-il "Debout sur le fil", encore un qui retient mon attention. Tout est enchaîné à grande vitesse, urgent et instinctif, micro au poing, avant que l'artiste ne calme le jeu avec un titre clavier/voix agrémenté de nombreux effets.
C'est là qu'Arnaud Michniak nous offre quelques pépites immanquables de son dernier album, qu'il exécute de manière magistrale, sans artifice, avec justesse, émotion et beaucoup de pudeur, comme une retenue : "La Lune nous voit", pour commencer, magique, puis ce grand moment se prolonge quand arrive la rythmique entêtante de "Sans notice", lourde et presque tribale. Deux morceaux incroyables, très représentatifs de l'esprit du fabuleux Pour qui sonne le tilt. Le chanteur s'assied ensuite sur un retour, et envoie un nouveau morceau, calme et angoissant, puis nous sort une autre chanson délirante façon "Le Jackpot", en un peu plus légère. Une fois le titre lâché, Michniak s'empare d'une guitare et embraye sur quelques accords en palm mute : le suspense est lancé alors que la gratte dissone tranquillement, et au bout d'une longue improvisation, on peut reconnaître les paroles de "À travers les gens comme au fond de moi", dans une étrange version modifiée, abrégée et peut-être légèrement expédiée. Michniak quitte la scène, rapidement rappelé à l'ordre.
Le chanteur revient et demande : " est-ce qu'il y a des loups à Grenoble ? " ; " vous voulez un truc lourd ? On va faire un truc lourd, pour les loups ". Et derrière son propos bizarre, il avait raison de nous prévenir : le morceau annoncé est basé sur une très grosse instru hip hop. On assiste même à une surenchère avec une autre chanson excellente, qui dégage beaucoup d'émotion, et qui sonne elle aussi salement rap français (" j'ferais mieux... ", répété machinalement par le chanteur, comme à lui-même). Peut-être la couleur du nouvel album à venir ? C'est là qu'on se demande comment on peut ramener le style de Michniak à du simple spoken word, tant sa musique est singulière et ne ressemble à aucune autre, et surpasse les limites des cages dans lesquelles on pourrait l'enfermer. On en a la preuve face à lui. L'intéressé nous interpelle alors, un brin arrogant et visiblement satisfait de son taf : " vous en voulez encore ou ça suffit ? ". C'est là qu'il nous lâche ce qui sera peut-être le morceau le plus surprenant de tout le concert, dans la veine des titres précédents, plus rap français que le rap français, et en même temps, conçu avec la griffe reconnaissable entre mille de l'ex-Diabologum. Planante, groovy, voilà encore une instru géniale qui accompagne un texte coup de poing, à la fois simple, limpide et émouvant, que Michniak terminera en le dédicaçant à plusieurs personnes, à La Bobine, et à Grenoble. Enfin, une dernière rythmique urbaine en guise d'estocade fera office de conclusion du méfait, mêlant à nouveau des paroles de différentes chansons, "Tandis que" et "Je suis le peuple sans visage", avant qu'Arnaud Michniak ne disparaisse d'un coup, comme un voleur, à peine l'improvisation entamée, nous laissant seuls avec sa musique qui continue à tourner sur son ordinateur, puis dans nos cerveaux, et enfin dans le vide. Le tilt avait sonné.
Au final, je ressors bluffé du programme qui aura duré à peine plus d'une heure. Bluffé par tant de spontanéité, d'urgence, et de vérité déployée par Michniak. Le tout dans un set maîtrisé de bout en bout, sur ce qui était certainement l'une des prestations les plus punk que j'ai pu voir, dans le fond. On pourrait peut-être simplement regretter de ne pas avoir pu vivre en live quelques morceaux encore plus bruts et directs en guitare/voix, débarrassés des machines, ou bien plus d'anciennes pièces issues de Poing perdu ("Je suis le peuple sans visage" ayant été à peine mentionné...). Si l'on poussait l'analyse un peu plus loin, on se demanderait si l'artiste n'assume plus ses premiers efforts ou si, tout simplement, il ne cherche pas à passer complètement à autre chose. Mais qu'importe : il fallait bien défendre ce prochain opus, et les morceaux malheureusement occultés de ses dernières compositions. De toute façon, en sortant d'une heure intensive d'un concert pareil, on sait que l'on a eu affaire à un génie têtu et perfectionniste en la personne d'Arnaud Michniak. Si sa musique est parfois narrée, à travers son chant si caractéristique, et la mise en scène dépouillée et efficace de ce qu'il a à nous dire ou nous faire comprendre, alors j'estime avoir assisté au récital d'un conteur hors du commun. À recommander franchement à quiconque voudra écouter de la poésie, des mots tranchants et de la sincérité, et à tous les récents adorateurs de groupes aux noms de félins (je ne pense, bien évidemment, pas uniquement à Pantera...). Ce mec est sans aucun doute l'un des artistes les plus talentueux et les plus sous-estimés du paysage musical français, toutes scènes et tous styles confondus.
Je me casse de La Bobine, non sans avoir retenté l'expérience bière locale. Tout le monde semble s'être remis du choc. Pas moi. Et alors que la voix de Michniak raisonne encore dans mon crâne atteint, je m'enfonce à nouveau dans les rues noires et désertes de Grenoble, pour m'y perdre. Épilogue cohérent de la soirée à laquelle j'ai assisté, rare et unique. Pendant ce temps, la Lune me voit...
Parfait 17/20 | par Pumpkin Ben |
Photo prise par Pumpkin Ben
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