Stephen Malkmus

Est-ce en hommage à son vieux pote David Berman, décédé l'an dernier ? Après une virée électro - que je n'ai pas eu le courage d'écouter - Stephen Malkmus repart à l'opposé, toujours sans ses Jicks, pour nous plonger dans les "techniques traditionnelles" : un revival country-folk-blues mélancolique que n'aurait pas renié le regretté susnommé. Le titre de l'album est emprunté au philosophe allemand Adorno, qui avait à l'époque bashé les Beatles en parlant de "techniques traditionnelles sous une forme dégradée". Le fantôme des Beatles plane bien sur ce disque, mais les techniques traditionnelles ne viennent pas que d'Angleterre : des musiciens et/ou des instruments d'origine afghane, perse, balkanique et même nigériane ont été également mobilisés, donnant une couleur orientale qui rappelle la période Ravi Shankar des Fab Four, notamment sur "Shadowbanned", mais aussi sur "ACC Kirtan", la longue introduction planante qu'on aurait peut-être plutôt attendu en fin d'album.
Avec ce mix très malin et impeccablement produit de Beatles, mais aussi de Neil Young et de Stones période Sticky Fingers, Stephen Malkmus le roi du slacker-rock braconne carrément sur les terres de Wilco, comme en témoigne le poignant "Cash Up" et ses arrangements à base de guitare slide et banjo, ou le groovy "Xian Man" qui n'aurait pas juré sur le Being There de la bande à Tweedy.

Il n'en a pas perdu sa patte pour autant, et on reconnaît les jolies mélodies qu'il sait si bien trousser depuis l'époque de Pavement, même s'il avait à ces débuts pris l'habitude de les customiser à coups de bruits bizarres et de guitares saturées (on retrouve tout de même un solo cradingue par ci par là), ce que j'aimais bien étant jeune. Comme lui, j'ai vieilli, et sans renier tout ce qu'il a fait avant, j'apprécie à sa juste valeur ce magnifique retour aux sources.