The Black Swans
Who Will Walk In The Darkness With You ? |
Label :
Delmore Recording Society |
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Le cygne noir, c'est ainsi que le philosophe Nassim Nicholas Taleb appelle ces faits extrêmes hautement improbables et qui pourtant arrivent tout de même. Dans un domaine légèrement différent, The Black Swans se rattache à des histoires on ne peut plus plausibles mais dont les dénouements sont d'autant plus tristes qu'ils s'abattent à chaque fois sur des hommes déjà rongés par la morosité. Inscrit dans ce point de vue pessimiste, Who Will Walk In The Darkness With You ? réunit pour l'occasion deux américains plus sensibles aux malheurs du genre humain qu'à leur regain d'espoir jamais bien éternel. De ces observations presque nihilistes où la rédemption n'est qu'une parole de plus jetée en l'air, naît un sadcore terriblement déconcertant. Jerry DeCicca, davantage inspiré par des poètes des deux derniers siècles déroule des récits graves voire carrément mornes, dans une douleur palpable calmement articulée ; un phrasé engourdi et chevrotant de mélancolie. Il se détache des songwriters habituels en évitant les formats couplet/refrain qui sont de son point de vue loin de pouvoir restituer le fil de ses pensées. Attaché à cette qualité d'écriture, ses chansons tragiques développent alors des nouvelles amères qui nous détournent des formes habituelles. Des récits linéaires qui n'évitent pas les griffes d'un destin fatal qui se répète. Et à côté de lui se répand la tristesse du violon larmoyant de Noel Sayre autant affecté que sa guitare, formant ainsi un folk de chambre décrépi et malade ("Song Without You"). Le duo sculpte une musique en conséquence qui épouse parfaitement les silhouettes dévastées de ces fictions dont on souhaite qu'elles n'existent jamais. Notes au compte-goutte, métronome piégé dans la monotonie, cordes plaintives, le cortége qui les encadre est d'une opacité sans égale. Dans cette atmosphère plombée rappelant les britanniques de Tindersticks à leurs débuts (notamment par l'analogie avec la voix de Stuart Staples), apparaissent de manière anecdotique Jovan Karcic à la batterie et Joe Peppercorn au piano. Tous les deux pris également par cette neurasthénie ambiante, ce profond abattement auquel personne ne semble pouvoir échapper. Liés de cette manière à ces causes désespérées, ils parviennent néanmoins à introduire quelques pointes de blues, musique pas franchement gaie non plus, mais qui ont au moins le mérite de réconforter sur le solo fugace du titre éponyme ou de "Blue Sky". L'apaisement ne sera pas de longue durée mais il est parfois bon de se plonger corps et âme dans de tels recueils désincarnés. Dans l'obscurité. Seul. Car on ne souhaiterait à personne de nous y accompagner.
Bon 15/20 | par TiComo La Fuera |
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