Depeche Mode

Carcassonne [Festival De La Cité, Esplanade Gambetta] - lundi 06 juillet 2009

Un matin de Février 2009, dans une école primaire très très privée de Bordeaux...

Ce matin là, c'est la panique à l'école. Mes supérieures sont absentes et je suis le seul à pouvoir gérer l'accueil et le secrétariat. J'ai normalement cours à la Fac, mais vu les circonstances et que j'ai besoin d'heures supplémentaires, le poste de secrétaire de direction et de coordination m'échoit donc temporairement. Il est 8h30, la cloche au sonne, les dernières Desperate Housewives du quartier déposent leurs enfants in extremis, et je me retrouve enfin seul dans le bureau de ma chef, collé à celui de la directrice. Bon, c'est quoi le rapport avec Depeche Mode? Je vais y venir, mais pour raconter ce concert, je dois passer par toutes les étapes...

Ma directrice, blonde bordelaise quinquagénaire, aux lèvres récemment botoxées (une sorte de sosie de Fabienne Amiach, qui présente la météo sur la 3) vient me rappeler ce que je dois faire en tant que secrétaire de direction (je le sais très bien, ma boss, avant son absence m'avait déjà tout expliqué au préalable, mais je laisse parler notre chef d'établissement à la bouche de collagène pour la rassurer de son statut) et finit par me dire:

- Je suis en rendez-vous toute la matinée, qu'on ne me dérange sous aucun prétexte, sauf urgence évidemment.

- Oui, oui pas de problème (Allez, laisse moi tranquille...)

Je fais le tour des classes, relève les absences, appelle les parents pour faire le point, traite les dossiers en cours et enfin, je règle l'agenda du jour sur l'ordi. Je vois toute une troupe d'autres blondes bordelaises d'un certain âge arriver dans le bureau de la directrice, cette dernière ayant sorti le thé et les petits gâteaux. Mouais... Elles ne vont sans doute pas parler d'un projet éducatif ou d'élèves qui auraient besoin d'aide. Ok. Tu veux prendre du bon temps? Pas de problème. Si je tombe pour ce que je vais faire, tu tomberas avec moi.

Mon index glisse sur le clavier de l'ordi et tape aveuglément et malencontreusement:"Concert Depeche Mode 2009".
En effet, nos amis synthétiques s'apprêtent à sortir un album et un single, "Wrong", vient d'être dévoilé. C'est enfin l'occasion pour moi d'aller les voir en concert. Recherchant au plus proche de Bordeaux et voulant éviter les stades, je vois dans les listes: "6 juillet, Carcassonne". Tiens, je serai juste en vacances scolaires, le cadre pourrait être sympa. Je vois le prix, appelle l'office de tourisme de Carcassonne, la transaction se fait et je recevrai les places quelques jours plus tard. Chez les filles d'à côté, ça ne parle pas vraiment pédagogie, des rires de Marie-Chantal ou de Jacqueline de la Constance parviennent jusqu'à mon bureau. Allez, plus que 5 mois à tenir...

Vendredi 3 juillet 2009.
Les enfants vont enfin être en vacances, les parents viennent remercier l'équipe éducative, j'ai la chance qu'on m'offre quelques bonnes bouteilles de vin (certains parents possédant des vignobles réputés) et une carte cadeau de 50 euros à la Fnac (j'irai me procurer dans la foulée un Recoil, un Velvet, un Bashung et un Massive Attack, ces disques constitueront la bande son du voyage jusqu'à Carcassonne).

Je rejoins ma douce et préparons le lendemain le nécessaire de voyage (CD, K7, fringues, bouffe, tente, couchages...).

Dimanche 5 juillet 2009.
Il est temps d'aller chercher 10 000 rues plus loin notre Peugeot 104 (il est bien difficile de se garer à Bordeaux), véhicule exceptionnel s'il en est: carrosserie Kaki en écailles de Dragon, métal baigné dans des liquides ancestraux, direction non assistée, vitres électriques à la main, auto-radio K7 défaillant et grésillant (que j'ai affectueusement baptisé "mon lecteur K7 auto reverse Cuomo"), sièges qui grattent les parties nues du corps en été (ce qui est le cas en ces jours),et vitre latérale passager droite arrière pétée et remplacée par un bout de plastique. Vitesse maximum: 110 km/h (après le volant tremble et le reste du véhicule aussi, j'ai toujours cru qu'on allait exploser au-delà, ou peut-être voyager dans le temps...). Une fois les bagages et autre équipements installés, le poste cd calé entre les pieds de ma douce côté passager, c'est parti pour un voyage de 373 kilomètres.


Lundi 6 juillet 2009, enfin.
Nous avons pris la veille au soir le temps de se balader dans le centre-ville et la cité; plus haut dans la ville, un tas de gros camions attendent d'être déchargés sur la scène de l'Esplanade Gambetta. Déjà à 15h, une foule de gens commencent à faire la queue, pour un concert qui commencera vraisemblablement dans cinq ou six heures. Nous faisons de même en nous asseyant contre les grilles quadrillant la scène. Pour patienter, je lis The Strange Case Of Dr. Jekyll and Mr. Hyde tandis que des trentenaires "Devotees" bedonnants, arborant fièrement des T-Shirts du groupe période Violator, discutent du groupe et de U2, en tentant des comparaisons. A ce moment là, je ne sais pas pourquoi, me vient l'étrange réflexion suivante: "est-ce qu'il y a deux types de fans de Depeche Mode? Est ce que le fan de Depeche Mode de gauche a pour autre groupe préféré The Cure? Est ce que le fan de Depeche Mode de droite a pour autre groupe favori U2? Est-ce que Simple Minds c'est centriste?"... Il faisait chaud et mon esprit n'était pas forcément clair... Aux alentours de 19h30 / 20h00 les grilles s'ouvrent, et nous allons nous installer. Motor, un duo de chez Mute, assure la première partie: assez dispensable. De la pluie commence à tomber pendant que les techniciens s'affairent à installer la scène pour les Depede Moche. Un fan harcore particulièrement irritant à côté de nous commence à chanter: Oh God, It's raining but I'm not complaining...... Je n'ai pas spécialement quelque chose contre "But Not Tonight" mais j'aurais souhaité avoir la rapidité d'exécution d'un Casey Riback pour neutraliser, dans les règles de l'art du Saumon Agile, ce fan un peu trop casse-burnes à mon goût... Bref, la scène prend forme, la boule à facettes au centre est installée, les synthés de Gore, Gordeno et Fletcher prennent place, ainsi que la batterie de Christian Eigner. La pluie finit par cesser (et mon apprenti chanteur aussi) et parviennent enfin à nos oreilles la note ouvrant Sounds Of The Universe. Fletcher et Gordeno, de noirs vêtus, se font visibles puis Martin Gore arrive en costume argenté. Ma tendre et chère se tourne vers moi et me dit:

- Ah! Voilà le Teletubbies de l'enfer! (Oui ,car depuis le visionnage d'un DVD de la tournée Playing The Angel dans lequel Gore avait un bonnet noir zarbi, tel est le surnom qui lui fut accordé ad vitam eternam par ma belle).

Gahan et Eigner font enfin leur entrée et le concert peut commencer. Sur la boule à facettes comme sur l'écran derrière le groupe, une femme marche sur place en projection. Le public, conquis d'avance, sent l'électricité et les frissons monter lorsque "In Chains" arrive à son point le plus rythmé."Wrong" suit mais le son en fait trop: c'est un excellent single, cependant les techniciens ou le groupe ont un peu craqué leur slip sur le volume et les basses, c'est plus désagréable que puissant, malgré la conviction de Gahan. Les choses se rééquilibrent ensuite sur le compulsif "Hole To Feed" et tout va pour le mieux. Puis, on bascule vers quelques titres des années 90 avec "Walking In My Shoes" (avec l'imagerie de corbeau propre à la période Songs Of Faith And Devotion) et "It's No Good" (un "Barrel Of A Gun" aurait été tellement chouette!). Je me dis alors que la structure des concerts est pompée plus ou moins sur celle élaborée durant la tournée Touring The Angel: 2, 3 titres du dernier album, retour sur 2,3 classiques, puis rebelote dans la même logique, jusqu'au rappels obligés avec "Personal Jesus", "Enjoy The Silence"... On va voir... Heureusement, "A Question Of Time" déboule et permet de réinjecter un peu plus d'énergie et d'entrain. Je me mets à espérer davantage de morceaux de Black Celebration, mais c'est le poli "Precious" qui succèdera. Enfin, miracle: des lumières nocturnes et orangées et ce sample si cool annoncent "Fly On The Windscreen", mon morceau favori du groupe. Je demande alors à mon égérie de bien étudier le travail d'Andrew Fletcher ("Tu me diras si pour toi il joue vraiment"). Blague à part, c'était génial de pouvoir vivre ce titre en Live autrement qu'en vidéo. Arrive le moment "Martin Mystère" obligé dans tout concert de Depeche Mode, avec ici le superbe "Home" et "Little Soul" tiré du dernier album; chanté normalement par Gahan, la version de Gore est malgré tout convaincante. Le vrai moment "mou" du concert s'ensuit avec l'enchaînement "Come Back" / "Peace", ce dernier morceau étant artificiellement accéléré pour le format Live, ce qui finit par me convaincre que le groupe, autant en album et en single qu'en concert ne saura vraiment jamais s'en dépatouiller.
Histoire de ne pas perdre le public, le groupe entame le dernier virage de son set pour rentrer dans l'autoroute des tubes: "In Your Room", "I Feel You", "Policy Of Truth","Enjoy The Silence" et "Never Let Me Down Again" (avec son célèbre final où Dave nous enseigne la fameuse technique de combat dite de l'essuie-glace. J'en profite pour regarder si mon interprète façon The Voice du début de ce concert est toujours là pour essayer cette arcane ancestrale de 1988, mais il a disparu). Le Dave donne là encore son maximum au point de littéralement déchanter avant le break d'"I Feel You" (rappelons qu'il avait subi peu de temps auparavant une opération pour une tumeur maligne, ayant remis temporairement en question la tournée Tour Of The Universe), heureusement le Martin a rattrapé la chose en assurant la partie de chant manquante. Les titres de cette partie ont tous bénéficié d'étirements (autant musicaux que fessiers en ce qui concerne Gahan) pour faire durer le plaisir.
Premier rappel et qui sera pour moi le sommet de ce concert: "Stripped", "Master And Servant" et "Strangelove". Un parfait triangle sensuel et énergique, surtout pendant "Strangelove" et sa projection vidéo fétichiste où deux jeunes filles se cherchent de manière plus ou moins saphique. Ma dulcinée, à cette issue, me demande:
- Tu as aimé ce passage, je suppose?
Ma réponse ne laissait aucun doute.

Nous n'avons pas eu le droit à un autre rappel façon "Encore Un Martin", présent il me semble sur d'autres dates, où Gore réinterprétait en solo des classiques du groupe période années 80, mais le groupe revient pour deux titres de Violator, l'obligé "Personal Jesus" et "Waiting For The Night", où Eigner abandonne sa batterie pour le clavier laissé par Gore, permettant à celui-ci de chanter en vrai duo avec Gahan, pour un moment de recueillement final, l'occasion de montrer une complicité totalement spontanée façon "t'es trop mon copain" entre les deux têtes de notre trio musical à cinq.

Voilà, Depeche Mode, c'est fait. Le regret sera toujours présent de ne pas les avoir vus à une autre époque (en deux mots: Alan Wilder), mais bon j'allais pas pouvoir y aller au temps du CM2 et des Mighty Max. Quelques titres d'"Ultra" en plus n'auraient pas été de trop, mais les passages de Violator ou de Songs Of Faith And Devotion étant obligés... Je suis malgré tout heureux d'avoir pu avoir du "Fly On The Windscreen", du "Stripped" et du "A Question Of Time". Pour le reste, Depeche Mode, quoiqu'on en dise, est un groupe qui fait plus que le taf en concert, et rien que pour ça, ça valait le coup. Les Setlists sont toujours très enfermées dans des carcans et des passages incontournables , cependant le plaisir finit toujours par l'emporter et c'est bien ça qui compte.


Très bon   16/20
par Machete83


  Setlist
- In Chains
- Wrong
- Hole To Feed
- Walking In My Shoes
- It's No Good
- A Question Of Time
- Precious
- Fly On The Windscreen
- Little Soul (Martin Gore)
- Home (Martin Gore)
- Come Back
- Peace
- In Your Room
- I Feel You
- Policy Of Truth
- Enjoy The Silence
- Never Let Me Down Again

Premier rappel:
- Stripped
- Master And Servant
- Strangelove

Second rappel:
- Personal Jesus
- Waiting For The Night


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