Logh
Lyon [Bistroy] - mardi 12 avril 2005 |
Quelle distance faut-il pour être touché par la majesté d'un groupe ? Cent mètres comme lors d'un festival gigantesque ? Dix mètres, devant une scène noyée sous un éclairage grandiloquent et derrière des barrières de sécurité ? Ou simplement un mètre, distance minimale pour éviter de se recevoir des coups de manche de la part du guitariste ?
Peu importe les longueurs à traverser, l'important c'est la capacité d'un groupe à laisser transparaître son énergie, sa hargne et son talent afin que le public puisse se trouver en phase avec lui.
En quelques chansons jouées sur le tas, coincé au fond d'un bar ridiculement étroit, les pieds sur des tapis comme seule estrade, séparé d'un rien d'un public peu nombreux mais respectueux, Logh aura fourni ce soir-là une performance inoubliable, sans fioriture et avec une honnêteté qui force l'admiration. Comme quoi, il suffit quelques fois de peu de moyens pour arriver à créer une ambiance unique où la passion de la musique, la morgue du rock et le talent insolent s'entrecroisent à merveille.
Après avoir ouvert une bouteille de vin, achetée sur la route, les membres du groupe suédois se sont alors détaché du public venu discuter et boire avec eux, pour se placer derrière les micro-pieds. L'assistance ne bougea pas, sa position étant déjà suffisamment privilégiée. Pas besoin de se tourner ou de lever la pointe des pieds, d'un regard l'ensemble était embrassé. La conivence pouvait donc être parfaite, d'autant que l'éclairage rudimentaire imposait une atmosphère intimiste à la soirée. On se serait cru à un concert privé. Dès le branchement de la prise jack sur l'ampli, un frisson parcouru la salle; Logh allait transformer l'univers un instant pour le changer en miracle de magie, en oraison éminente.
Il suffit du premier morceau, joué pied au plancher, pour que le ton soit donné : nerveux, sensible et touchant. Rentrant en transe, Mattias Friberg enchanta au cours de ses compositions énergiques (principalement issus des sessions de The Raging Sun et A Sunset Panorama), sinueuses, sorte de montagne russe où s'alternent furie exutoire et étirements délicats. Jens Heldren suivait le coup, en maniant à la perfection sa guitare pour en sortir à chaque fois un ensemble de notes claires aussi douces que fournies. C'est que les mélodies sont alambiquées et entraînent l'auditeur dans des dédales hypnotiques, aussi majestueux que les déserts de neige du Nord. Ce n'est pas pour autant que cette musique soit froide, c'est qu'elle est riche, planante et complexe. Il arrivait soudainement que Mattias Friberg et Mathias Oldèn, le bassiste, s'embarquent pour des passages furieux, au cours desquels ils profitaient du moindre périmètre pour se balancer et se tordre convulsivement. Immédiatement après, ils se campaient solidement derrière leurs micros afin de susurrer quelques mots suaves et discrets.
Des morceaux comme 'The Contractor And The Assasin" ou le magistral "City I'm Sorry", firent souffler le chaud et le froid pour faire pousser des accès de fièvre. Logh incarne le vertige, l'abandon de soi, l'expansion. " Fell Into The Well " ou " Sunset Knife Fight" mariaient parfaitement cette ambivalence entre colère échappée et grâce contenue. Les quelques touches de piano, les effets modestes mais efficaces ou encore la voix de Mattias Friberg, tantôt murmurante, tantôt criante, jetait un voile de poésie à ces expressions furibondes d'électricité.
Attirant sur eux le céleste, Logh laissa filer aux détours de chacune de ses mélodies enchanteresses, une mélancolie unique, bouleversante et suppliante. Malgré un son pourri, un retour de baffle et l'exiguïté de la salle, beaucoup d'émotions furent partagées. On était touché par cette délicatesse qui imprégnait ce groupe simple et attachant qui ne pouvait s'empêcher de noircir l'éclatante majesté de ses titres. Et ce n'est pas un "In Cold Blood" joué en rappel qui changera cette impression. L'intensité était à son sommet, non pas dans l'amplitude mais dans sa sincérité. On recevait frontalement toute l'expression du spleen des musiciens maquillée en chansons épurées, mais aussi leur joie brute et irréductible de pratiquer une musique qui est la leur, devant quelques fidèles seulement et au cours d'un show défoulant et agréable. Ils voulaient d'ailleurs prolonger encore cet étourdissement. Alors "The Bones Of Generations" fut joué, pour le plaisir, dans une version plus lente mais aussi plus saisissante.
Mélodies aigre-douces portées par des guitares tournoyantes, chansons ondulantes, furieuses comme éthérées: tout le charme de Logh était contenu là, en une soirée, dans un bar au milieu d'une trentaine de privilégiés perdus dans Lyon. Groupe obstiné, aventureux et voyageur, Logh préfère l'intimité aux grandes démonstrations. Ils préfèrent s'exprimer directement lors de concerts erratiques. Quoi de mieux en effet que peu d'espace pour diffuser son message mélancolique à la grandeur ignorée et au goût impénétrable du secret. Logh est un trésor incroyable, une merveille pour égoïste et surtout une formation à dimension humaine.
Communier avec eux, de si près, sans barrière, est un moment à vivre. Pour savoir ce que c'est que le rock. Des souvenirs pareils effacent tous les regrets...
Peu importe les longueurs à traverser, l'important c'est la capacité d'un groupe à laisser transparaître son énergie, sa hargne et son talent afin que le public puisse se trouver en phase avec lui.
En quelques chansons jouées sur le tas, coincé au fond d'un bar ridiculement étroit, les pieds sur des tapis comme seule estrade, séparé d'un rien d'un public peu nombreux mais respectueux, Logh aura fourni ce soir-là une performance inoubliable, sans fioriture et avec une honnêteté qui force l'admiration. Comme quoi, il suffit quelques fois de peu de moyens pour arriver à créer une ambiance unique où la passion de la musique, la morgue du rock et le talent insolent s'entrecroisent à merveille.
Après avoir ouvert une bouteille de vin, achetée sur la route, les membres du groupe suédois se sont alors détaché du public venu discuter et boire avec eux, pour se placer derrière les micro-pieds. L'assistance ne bougea pas, sa position étant déjà suffisamment privilégiée. Pas besoin de se tourner ou de lever la pointe des pieds, d'un regard l'ensemble était embrassé. La conivence pouvait donc être parfaite, d'autant que l'éclairage rudimentaire imposait une atmosphère intimiste à la soirée. On se serait cru à un concert privé. Dès le branchement de la prise jack sur l'ampli, un frisson parcouru la salle; Logh allait transformer l'univers un instant pour le changer en miracle de magie, en oraison éminente.
Il suffit du premier morceau, joué pied au plancher, pour que le ton soit donné : nerveux, sensible et touchant. Rentrant en transe, Mattias Friberg enchanta au cours de ses compositions énergiques (principalement issus des sessions de The Raging Sun et A Sunset Panorama), sinueuses, sorte de montagne russe où s'alternent furie exutoire et étirements délicats. Jens Heldren suivait le coup, en maniant à la perfection sa guitare pour en sortir à chaque fois un ensemble de notes claires aussi douces que fournies. C'est que les mélodies sont alambiquées et entraînent l'auditeur dans des dédales hypnotiques, aussi majestueux que les déserts de neige du Nord. Ce n'est pas pour autant que cette musique soit froide, c'est qu'elle est riche, planante et complexe. Il arrivait soudainement que Mattias Friberg et Mathias Oldèn, le bassiste, s'embarquent pour des passages furieux, au cours desquels ils profitaient du moindre périmètre pour se balancer et se tordre convulsivement. Immédiatement après, ils se campaient solidement derrière leurs micros afin de susurrer quelques mots suaves et discrets.
Des morceaux comme 'The Contractor And The Assasin" ou le magistral "City I'm Sorry", firent souffler le chaud et le froid pour faire pousser des accès de fièvre. Logh incarne le vertige, l'abandon de soi, l'expansion. " Fell Into The Well " ou " Sunset Knife Fight" mariaient parfaitement cette ambivalence entre colère échappée et grâce contenue. Les quelques touches de piano, les effets modestes mais efficaces ou encore la voix de Mattias Friberg, tantôt murmurante, tantôt criante, jetait un voile de poésie à ces expressions furibondes d'électricité.
Attirant sur eux le céleste, Logh laissa filer aux détours de chacune de ses mélodies enchanteresses, une mélancolie unique, bouleversante et suppliante. Malgré un son pourri, un retour de baffle et l'exiguïté de la salle, beaucoup d'émotions furent partagées. On était touché par cette délicatesse qui imprégnait ce groupe simple et attachant qui ne pouvait s'empêcher de noircir l'éclatante majesté de ses titres. Et ce n'est pas un "In Cold Blood" joué en rappel qui changera cette impression. L'intensité était à son sommet, non pas dans l'amplitude mais dans sa sincérité. On recevait frontalement toute l'expression du spleen des musiciens maquillée en chansons épurées, mais aussi leur joie brute et irréductible de pratiquer une musique qui est la leur, devant quelques fidèles seulement et au cours d'un show défoulant et agréable. Ils voulaient d'ailleurs prolonger encore cet étourdissement. Alors "The Bones Of Generations" fut joué, pour le plaisir, dans une version plus lente mais aussi plus saisissante.
Mélodies aigre-douces portées par des guitares tournoyantes, chansons ondulantes, furieuses comme éthérées: tout le charme de Logh était contenu là, en une soirée, dans un bar au milieu d'une trentaine de privilégiés perdus dans Lyon. Groupe obstiné, aventureux et voyageur, Logh préfère l'intimité aux grandes démonstrations. Ils préfèrent s'exprimer directement lors de concerts erratiques. Quoi de mieux en effet que peu d'espace pour diffuser son message mélancolique à la grandeur ignorée et au goût impénétrable du secret. Logh est un trésor incroyable, une merveille pour égoïste et surtout une formation à dimension humaine.
Communier avec eux, de si près, sans barrière, est un moment à vivre. Pour savoir ce que c'est que le rock. Des souvenirs pareils effacent tous les regrets...
Intemporel ! ! ! 20/20 | par Vic |
Photo par Vic. Merci.
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