Can
Ege Bamyasi |
Label :
Spoon |
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Fin 1971, Can change de studio et s'installe dans un ancien cinéma qu'ils aménagent à leur guise, devenant ainsi le fameux Inner Space Studio. Holger Czukay utilisera pour décrire le lieu l'image assez étrange d'un 'éléphant vu de l'intérieur'. Mouais... en tout les cas, la créativité du groupe, si elle n'explose pas grâce à ce nouveau paysage, continue sur la voie toute tracée par les opus précédents de l'expérimentation rythmique. Et c'est tant mieux.
Ege Bamyasi est toutefois moins sombre que son illustre prédécesseur, Tago Mago. Ceci étant dû en grande partie au jeu très funky de Jaki Liebezeit. Dès "Pinch", le doute n'est plus permis, cet homme a dû au moins écouter une fois dans sa vie les "Cold Sweat" ou "Funky Drummer" de James Brown. C'est bien simple, s'il n'y avait les solos de guitares distordues de Michael Karoli et la performance vocale hallucinée et hallucinante de Damo Suzuki, on jurerait entendre un autre hymne funk de Mr Dynamite. "Sing Swan Song" se propose de nous laisser souffer quelques minutes après les 9 min 30 éreintante de "Pinch", avec une ballade dont la douceur est souligné par le chant tout en retenue de Damo Suzuki. Petite aparté sur le fantasque nippon : si la musique de Can pourrait aisément se passer de chanteur, il est indéniable que Damo Suzuki contribue à renforcer par la force de son chant à la fois angoissé et exalté, l'aspect hypontique du groupe teuton. Parce qu'à force d'encenser (à juste titre) le batteur exceptionnel qu'est Jaki Leibezeit, on en oublierai presque le chanteur exceptionnel qu'est Damo Suzuki.
"One More Night", au groove monstreux, poursuit l'exploration funk débutée par "Pinch", mais cette fois-ci agrémentée des claviers aux accents très jazz-rock d'Irmin Schmindt. Et puis vient le clou de l'album, "Vitamin C", qui réaffirme à qui ne voudrait pas l'entendre que Can était avant tout le plus grand groupe de rock primitif qui ait jamais existé, dans la droite lignée d'un Bo Diddley. Oh bien sûr, il s'agit d'une primitivité rudement développée, je vous l'accorde... mais la répétitivité et la rythmique tribale implacable sont là, pour notre plus grand bonheur.
Can nous offre également une de ses spécialités avec une longue plage expérimentale, "Soup" qui démarre comme du PIL avant l'heure et se transforme en son milieu en collage électro subordonné par des claviers crispants et les intonations bizarres de Damo Suzuki qu'on croirait provenir d'un SS défoncé au LSD. "I'm So Green" dans la même veine que "Vitamin C", se repose sur une rythmique funk mais aux relents plus pop. Titre peut-être plus conventionnel qu'à l'accoutumée mais néanmoins excellent.
L'album se termine par l'immense "Spoon" qui deviendra le premier top 40 allemand dans la carrière du groupe. En effet, "Spoon" aura l'immense honneur de devenir le générique d'une série policière allemande. La question fatidique est donc posée : est-ce que Derrick aurait été une série moins chiante si elle avait eu "Spoon" comme générique (ou tout autre titre de Can) ? Ou est-ce que le problème de cette série ne viendrait pas du manque de charisme de l'acteur principal Horst Tappert ? Certains évoquent même comme principal défaut une photographie calamiteuse. Hum... des questions qui resteront, je le crains, éternellement en suspend.
Ege Bamyasi est l'autre chef-d'oeuvre de Can. Le complément indispensable à Tago Mago. Celui-ci est peut-être plus cohérent mais a contratrio c'est aussi son éclectisme à défaut d'unité qui fait la force de Ege Bamyasi, ce monument indestructible érigé à la gloire du rock primitif et expérimental.
Ege Bamyasi est toutefois moins sombre que son illustre prédécesseur, Tago Mago. Ceci étant dû en grande partie au jeu très funky de Jaki Liebezeit. Dès "Pinch", le doute n'est plus permis, cet homme a dû au moins écouter une fois dans sa vie les "Cold Sweat" ou "Funky Drummer" de James Brown. C'est bien simple, s'il n'y avait les solos de guitares distordues de Michael Karoli et la performance vocale hallucinée et hallucinante de Damo Suzuki, on jurerait entendre un autre hymne funk de Mr Dynamite. "Sing Swan Song" se propose de nous laisser souffer quelques minutes après les 9 min 30 éreintante de "Pinch", avec une ballade dont la douceur est souligné par le chant tout en retenue de Damo Suzuki. Petite aparté sur le fantasque nippon : si la musique de Can pourrait aisément se passer de chanteur, il est indéniable que Damo Suzuki contribue à renforcer par la force de son chant à la fois angoissé et exalté, l'aspect hypontique du groupe teuton. Parce qu'à force d'encenser (à juste titre) le batteur exceptionnel qu'est Jaki Leibezeit, on en oublierai presque le chanteur exceptionnel qu'est Damo Suzuki.
"One More Night", au groove monstreux, poursuit l'exploration funk débutée par "Pinch", mais cette fois-ci agrémentée des claviers aux accents très jazz-rock d'Irmin Schmindt. Et puis vient le clou de l'album, "Vitamin C", qui réaffirme à qui ne voudrait pas l'entendre que Can était avant tout le plus grand groupe de rock primitif qui ait jamais existé, dans la droite lignée d'un Bo Diddley. Oh bien sûr, il s'agit d'une primitivité rudement développée, je vous l'accorde... mais la répétitivité et la rythmique tribale implacable sont là, pour notre plus grand bonheur.
Can nous offre également une de ses spécialités avec une longue plage expérimentale, "Soup" qui démarre comme du PIL avant l'heure et se transforme en son milieu en collage électro subordonné par des claviers crispants et les intonations bizarres de Damo Suzuki qu'on croirait provenir d'un SS défoncé au LSD. "I'm So Green" dans la même veine que "Vitamin C", se repose sur une rythmique funk mais aux relents plus pop. Titre peut-être plus conventionnel qu'à l'accoutumée mais néanmoins excellent.
L'album se termine par l'immense "Spoon" qui deviendra le premier top 40 allemand dans la carrière du groupe. En effet, "Spoon" aura l'immense honneur de devenir le générique d'une série policière allemande. La question fatidique est donc posée : est-ce que Derrick aurait été une série moins chiante si elle avait eu "Spoon" comme générique (ou tout autre titre de Can) ? Ou est-ce que le problème de cette série ne viendrait pas du manque de charisme de l'acteur principal Horst Tappert ? Certains évoquent même comme principal défaut une photographie calamiteuse. Hum... des questions qui resteront, je le crains, éternellement en suspend.
Ege Bamyasi est l'autre chef-d'oeuvre de Can. Le complément indispensable à Tago Mago. Celui-ci est peut-être plus cohérent mais a contratrio c'est aussi son éclectisme à défaut d'unité qui fait la force de Ege Bamyasi, ce monument indestructible érigé à la gloire du rock primitif et expérimental.
Intemporel ! ! ! 20/20 | par Sirius |
Posté le 17 mai 2007 à 12 h 05 |
Ah, Can. Groupe culte parmi les groupes cultes. Cet album qui succéda au fameux Tago-Mago est une petite merveille. Toujours aussi audacieuse qu'accessible, spontanée que rigoureuse, leur musique est reconnaissable entre mille. Can est un groupe qui travaille sur la base d'improvisations interminables, et qui pioche et parfois retravaille les meilleurs moments pour en réaliser un disque. Celui-ci vient donc témoigner d'instants fugaces d'alchimie entre cinq musiciens complètement hors-normes. Aucune démonstration excessive de virtuosité comme ce fut le cas en cette période de prog-rock. Il suffit d'écouter "One More Night" et de se concentrer sur le jeu du batteur: il ne fait rien semble-t-il. Ou plutôt dirons nous ce qui est, il se prend pour une boîte à rythmes. Mais entendre quelqu'un tenir aussi parfaitement un rythme sec pendant plus de cinq minutes, ceci tient du prodigieux. Le chant est parfois approximatif, mais on s'en fout, Suzuki est complètement allumé (moment d'anthologie où il converse avec les instruments en débitant des sentences en yahourt à un débit de mitraillette, sur "Soup"). Le disque entier tient autant du délire bruitiste que de la ballade hallucinée. Maîtrisés mais jamais figés, les morceaux sont toujours sur le fil entre énorme rigueur et totale indiscipline. Et quand vient le tube de Can, le néamoins excentrique "Spoon", on se dit qu'on tient là un des groupes les plus novateurs de tous les temps. Finalement assez proche des premiers délires de Mercury Rev, Ege Bamyasi nous envoie de 1972 un vent de folie psychédélique qui sera toujours salutaire dans 30 ans.
Parfait 17/20
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