Tindersticks

Ypres

Ypres

 Label :     City Slang 
 Sortie :    vendredi 17 octobre 2014 
 Format :  Bande Originale / CD  Vinyle  Numérique   

Les Tindersticks ont déjà réalisé de nombreuses bandes originales de films, ici c'est un peu différent puisque Ypres est la bande-son de l'exposition permanente du musée In Flanders Fields WWI de la ville belge du même nom.
Les batailles d'Ypres durant toute la première guerre mondiale ont fait plus de 300 000 morts côté allié, principalement des combattants britanniques, canadiens, australiens et des pays du Commonwealth. La ville est aussi tristement passée à la postérité avec l'ypérite, l'autre nom du gaz moutarde utiliser pour la première fois en masse à cet endroit. C'est aussi le lieu des premières fraternisations au moment de noël en 1914.
Pour les musiciens du groupe j'imagine aisément que l'émotion n'était pas uniquement musicale, chacun de leurs noms se retrouve dans la liste sans fin des morts disponible sur le site du musée.

Ce n'est pas une musique agréable, elle n'est pas faite pour ça, c'est une musique âpre, austère, mais nécessaire, dévouée au souvenir de ces centaines de milliers de soldats morts, de ces fantômes. Ypres est un mémorial.
Le groupe ne se met pas en avant, pas de batterie, pas de groove, pas de voix chaude ; tout a disparu au profit d'une ambiance dont la pochette est l'illustration parfaite, on ne distingue rien, on ne fait que ressentir un malaise continu empreint de solennité, de religiosité. On n'écoute pas ces paysages sonores pour se détendre, par contre ils ont une force évocatrice magistrale, et ce dès le début : le premier son est celui d'une cloche, un tocsin. Puis arrivent des cordes, ponctuées de bruits illustrants les obus, les larmes, la peur. Une longue et lourde pâte sonore, plus ou moins synthétique, des cordes angoissantes, des percussions lointaines, voilà à quoi ressemble les six morceaux. Seul "Sunset Glow" apporte un peu de lumière grâce aux notes de piano semées ici et là, et aux cordes bien moins oppressantes.
On est bien loin de la pop, de la soul arty jouée par le groupe, Ypres se situe à la frontière de la musique classique contemporaine, de compositeurs tels que Benjamin Britten ou Arvo Pärt. Pour donner une idée, c'est plus vers le cinéma que j'irai, dans les paysages désolés de La Vie Et Rien d'Autres; ou vers le long panorama de Joe Sacco, Le Premier Jour De La Bataille De La Somme qui illustre cette journée du début à la fin en un seul et minutieux dessin de sept mètres de long par vingt centimètres de large.
J'en suis ressorti engourdi, presque groggy. L'effet de ce disque est proprement physique, et c'est là je pense sa grande réussite.

Il est difficile de noter un tel album, intemporel me paraît le seul qualificatif digne.


Intemporel ! ! !   20/20
par NicoTag


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