Neil Young
The Times |
Label :
Reprise |
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Comme beaucoup de monde, Neil Young s'est retrouvé confiné en mars 2020. Rapidement, de chez lui à Telluride, il a commencé à diffuser des vidéos filmées avec un téléphone par Daryl Hannah, sa compagne ; c'est elle également qui signe la plaisante photo de couverture. A raison de cinq ou six morceaux à chaque fois, ces "Fireside Sessions" comme il les a baptisées, sont revenues plusieurs fois.
The Times reprend intégralement le "Porch Episode", cinquième session diffusée le 1er juillet. On le voit sur une terrasse en bois, assis sur un tonneau, son trépied porte-harmonica à ses côtés, il nous offre une sélection très politique en sept titres et une trentaine de minutes.
Le disque débute par "Alabama", indissociable de "Southern Man" qui figure sur la face B, ces brûlots contre le racisme ont tout deux été écrits il y a 50 ans. Derrière sa voix douce, presque fragile on sent que la furie originelle laisse place à de la résignation.
"Qu'est-ce qui a changé finalement ?" Semble t-il nous dire. Sur ces chansons et sur "Ohio" on sent qu'il force sa voix vieillissante, c'est crépusculaire.
Suit un rare "Campaigner", le militant, qui fait référence aux présidentielles américaines de 1968 et à Richard Nixon. On comprend vite le parallèle fait avec Donald Trump. Plusieurs fois le Nixon du texte a été remplacé par les présidents suivants, Bill Clinton, George Bush père et fils, etc. Là comme ailleurs sur ce court disque, on entend ses pieds qui marquent le rythme sur le plancher, ses doigts crisser sur les cordes, et même sa main droite qui cogne sur la caisse.
"Ohio" est une évidence sur un tel disque. C'est la première grande chanson engagée de Neil Young, un emblème incandescent de sa discographie. Elle est écrite juste après le meurtre de quatre étudiants perpétré par la Garde Nationale le 4 mai 1970 à la Kent University, et enregistrée immédiatement avec Crosby, Stills & Nash. Le morceau est un classique instantané que Neil Young ressort régulièrement, en 1989 à Paris il l'a dédié au "Chinese boy in front of a tank" de la place Tian-an-men. Même sur ce disque plutôt calme les cordes claquent comme des coups de fouet.
Neil Young reprend souvent Bob Dylan, "The Times They Are A Changin'" ferme cette première face. C'est bien sûr l'archétype de la protest-song, sortie en 1964 pendant le renouveau folk et le mouvement des droits civiques, elle est immédiatement devenue un hymne. La reprise est interprétée avec beaucoup d'humilité.
On retourne le disque. "Lookin'for A Leader 2020" parue sur Living With War en 2006, album engagé contre George Bush Jr, ici les paroles sont remaniées pour coller à l'époque, il cite Black Lives Matter et le mur à la frontière mexicaine par exemple. Le morceau, électrique et assez médiocre au départ, sonne très bien en solo acoustique.
Le sublime "Little Wing", manière de clore The Times calmement, c'est un vrai cadeau que ce titre qu'il a si peu interprété, des chanceux ont pu l'entendre à l'été 1977 dans quelques bars californiens où Neil Young tournait avec les Ducks, groupe dans lequel officiaient d'anciens Moby Grape. Il y a une interruption au milieu du titre, on entend Daryl Hannah : "Don't go", une porte se ferme, Neil Young reprend, visiblement épuisé. L'ensemble de ces sessions constituent pour l'instant ses plus récents enregistrements, on ressent clairement de la faiblesse, mais aussi, et c'est récent, de la délicatesse.
Sans aucune retouches, The Times est un disque sec, brut, primitif, éloigné de ses exigences techniques habituelles et loin des chevauchées électriques. C'est sa façon bien à lui, et malgré tous ses paradoxes (avec Amazon entre autres), de se dresser encore en contre.
The Times reprend intégralement le "Porch Episode", cinquième session diffusée le 1er juillet. On le voit sur une terrasse en bois, assis sur un tonneau, son trépied porte-harmonica à ses côtés, il nous offre une sélection très politique en sept titres et une trentaine de minutes.
Le disque débute par "Alabama", indissociable de "Southern Man" qui figure sur la face B, ces brûlots contre le racisme ont tout deux été écrits il y a 50 ans. Derrière sa voix douce, presque fragile on sent que la furie originelle laisse place à de la résignation.
"Qu'est-ce qui a changé finalement ?" Semble t-il nous dire. Sur ces chansons et sur "Ohio" on sent qu'il force sa voix vieillissante, c'est crépusculaire.
Suit un rare "Campaigner", le militant, qui fait référence aux présidentielles américaines de 1968 et à Richard Nixon. On comprend vite le parallèle fait avec Donald Trump. Plusieurs fois le Nixon du texte a été remplacé par les présidents suivants, Bill Clinton, George Bush père et fils, etc. Là comme ailleurs sur ce court disque, on entend ses pieds qui marquent le rythme sur le plancher, ses doigts crisser sur les cordes, et même sa main droite qui cogne sur la caisse.
"Ohio" est une évidence sur un tel disque. C'est la première grande chanson engagée de Neil Young, un emblème incandescent de sa discographie. Elle est écrite juste après le meurtre de quatre étudiants perpétré par la Garde Nationale le 4 mai 1970 à la Kent University, et enregistrée immédiatement avec Crosby, Stills & Nash. Le morceau est un classique instantané que Neil Young ressort régulièrement, en 1989 à Paris il l'a dédié au "Chinese boy in front of a tank" de la place Tian-an-men. Même sur ce disque plutôt calme les cordes claquent comme des coups de fouet.
Neil Young reprend souvent Bob Dylan, "The Times They Are A Changin'" ferme cette première face. C'est bien sûr l'archétype de la protest-song, sortie en 1964 pendant le renouveau folk et le mouvement des droits civiques, elle est immédiatement devenue un hymne. La reprise est interprétée avec beaucoup d'humilité.
On retourne le disque. "Lookin'for A Leader 2020" parue sur Living With War en 2006, album engagé contre George Bush Jr, ici les paroles sont remaniées pour coller à l'époque, il cite Black Lives Matter et le mur à la frontière mexicaine par exemple. Le morceau, électrique et assez médiocre au départ, sonne très bien en solo acoustique.
Le sublime "Little Wing", manière de clore The Times calmement, c'est un vrai cadeau que ce titre qu'il a si peu interprété, des chanceux ont pu l'entendre à l'été 1977 dans quelques bars californiens où Neil Young tournait avec les Ducks, groupe dans lequel officiaient d'anciens Moby Grape. Il y a une interruption au milieu du titre, on entend Daryl Hannah : "Don't go", une porte se ferme, Neil Young reprend, visiblement épuisé. L'ensemble de ces sessions constituent pour l'instant ses plus récents enregistrements, on ressent clairement de la faiblesse, mais aussi, et c'est récent, de la délicatesse.
Sans aucune retouches, The Times est un disque sec, brut, primitif, éloigné de ses exigences techniques habituelles et loin des chevauchées électriques. C'est sa façon bien à lui, et malgré tous ses paradoxes (avec Amazon entre autres), de se dresser encore en contre.
Parfait 17/20 | par NicoTag |
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